Image conférence : Le christianisme comme philosophie par excellence chez les Pères apologistes - Stéphane Mercier
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Le christianisme comme philosophie par excellence chez les Pères apologistes

La conférence de décembre nous conduit ainsi à un carrefour suggérant plusieurs voies à explorer pour la suite. D’un côté, nous y trouvons occasion d’inscrire la démarche chrétienne au sein de la culture grecque du monde méditerranéen : le christianisme, bien entendu, naît de la Révélation et est ainsi directement l’œuvre de Dieu, mais cette œuvre surnaturelle, sans être du monde, trouve progressivement sa voie dans le monde. La surnature, nous l’avons déjà vu à plusieurs reprises dans les cycles de conférences précédents, n’oblitère pas la nature, elle ne se substitue pas à elle, mais elle la perfectionne.

Rien de plus thomiste que ce regard porté sur la relation du naturel au surnaturel qui l’élève, pour l’anoblir sans l’abolir. La foi chrétienne va ainsi trouver une voie (avec e) et une voix (avec x) pour faire entendre son message au monde, et s’« inculturer » dans le meilleur sens de ce néologisme fort répandu de nos jours : non pas devenir inculte, bien sûr, mais s’intégrer à la culture, ou plutôt trouver sa place au sein de la culture afin d’y œuvrer comme le levain dans la pâte, selon la belle métaphore proposée par le Seigneur lui-même dans l’Évangile.

Ainsi l’œuvre des Pères qu’on appelle « apologistes », au deuxième siècle, est-elle toute pénétrée de l’idée qu’il faut faire entendre aux représentants de la grande culture du monde antique que le message chrétien n’est pas porté par la barbarie irrationnelle de quelques exaltés, mais réalise, à la hauteur surnaturelle, l’aspiration la plus profonde de la philosophie. Car la philosophie est, par définition, l’amour de la sagesse : et qu’est-ce que le christianisme sinon l’amour de la Sagesse éternelle ? Ainsi parle, en effet, la Sagesse dans le livre des Proverbes (chap. 8) : « Le Seigneur m’a possédée au commencement de ses voies : avant qu’il créât aucune chose, j’étais dès lors. J’ai été établie dès l’éternité et dès le commencement, avant que la terre fût créée. » Or la Sagesse est venue dans le monde, mais on le sait par le prologue de saint Jean, si la vraie Lumière est venue dans le monde, le monde ne l’a point connue.

Les Apologistes n’ont pas d’autre ambition que de montrer à ce monde qui ne l’a point connu, que le Christ n’est pas venu détruire notre raison, mais conduire tout notre être où il aspire, réalisant ainsi ce qu’aucune philosophie humaine n’a pu accomplir.