La paresse - Stéphane Mercier

La « paresse »

… qui est plus exactement l’acédie. La paresse aurait presque bonne presse : le paresseux apparaît comme un être sympathique, qu’il s’agisse de l’animal de ce nom, ou l’individu qu’on qualifie ainsi, et que son innocuité rend aimable. Beaucoup sont plus qu’indulgents vis-à-vis de lui : le farniente est le rêve avoué de bien des gens, et l’on se prend à sourire devant les multiples stratégies ingénieuses par lesquelles Gaston Lagaffe ou Wally (le personnage de la série Dilbert, par Scott Adams) s’arrangent afin de ne pas devoir travailler pour leur employeur.
Pourtant, comme le notait déjà l’empereur-philosophe Marc Aurèle (Pensées, V 1), nous sommes nés pour faire œuvre d’homme, non pour dormir, de sorte que la paresse va à l’encontre de notre humanité la plus profonde. Mais la paresse n’est que la partie émergée de l’iceberg : ce péché n’est capital que parce qu’il est d’abord acédie, c’est-à-dire manque d’entrain, voire dégoût pour les choses spirituelles : notre posture debout est une invitation à nous élever, mais l’acédie veut que nous soyons contents de vivre prostrés.